Splendeur

Il me reste à composer mon grand livre sur le temps. Cela m’emplit de joie. Je suis un peu fatiguée, par les difficultés de la vie et par le traitement du cancer, mais la vitalité de l’esprit, du désir, de la joie, est totale en moi.

Je songe aux grands textes, je songe aux grands poètes mes compagnons de grande jeunesse, je suis dans la lumière de l’été, les cris des oiseaux, le ressac de la mer, les hauteurs des montagnes, tous et toutes mes compagnes et mes compagnons aussi. Je suis parfaitement seule et immensément accompagnée, je suis avec la vie, aux côtés des enfants, des femmes, des hommes, des arbres, je suis avec tout le vivant, toute la création, je suis au ciel et partout sur la terre, je suis le bonheur et l’amour absolus.

Je vous salue, humain-e-s.

*

Exode 15, 1-21 (ma traduction)

Myriam danse,Poursuivi par Pharaon, le peuple guidé par Moïse a franchi la mer Rouge, mer du Roseau – que j’ai appelée aussi mer du Parler, parce que les roseaux parlent. Pharaon et ses armées sont engloutis, un chant de joie s’élève.

1. Alors auront, eurent à chanter Moïse et les fils d’Israël ce chant via le Seigneur. Ils dirent via dire :

« Que je chante via le Seigneur !

il est monté, il est monté,

cheval et cavalier dans la mer il a jetés !

2. Ma force, un chant, Yah ! Via lui il fut, mon salut !

Lui, mon Dieu, je le louange, Dieu de mon père, je l’exalte !

3. Le Seigneur est un guerrier, Seigneur est son nom !

4. Chars de Pharaon et son armée, dans la mer il les a jetés !

L’élite de ses officiers s’est enfoncée dans la mer du Roseau,

5. les abîmes les couvrent,

ils ont coulé aux profondeurs comme une pierre.

6. Ta droite, Seigneur, magnifique en puissance,

ta droite, Seigneur, brise l’ennemi.

7. Dans la profusion de ta majesté, tu détruis ceux qui se dressent contre toi,

tu envoies le feu de ta colère, il les mange comme du chaume !

8. Au souffle de tes narines, s’avisèrent les eaux,

s’enflèrent comme une digue les ondes,

se figèrent les abîmes dans le cœur de la mer !

9. L’ennemi disait :

Je poursuivrai, j’atteindrai,

je partagerai le butin,

je m’en remplirai l’âme,

je viderai mon épée,

ma main les ruinera !

10. Tu fis souffler dans ton esprit,

la mer les couvrit,

ils sombrèrent comme du plomb

dans les eaux formidables.

11. Qui est comme toi parmi les dieux, Seigneur ?

Qui est comme toi magnifique en sainteté,

terrifiant de gloire,

faisant merveille ?

12. Tu as étendu ta main,

le pays va les engloutir.

13. Tu as dirigé dans ton amour

ce peuple que tu as racheté,

tu l’as conduit par ta puissance

vers ta demeure sainte.

14. Ils ont entendu, les peuples,

ils frémissent !

Une douleur saisit

les habitants de Philistie.

15. Alors sont troublés

les maîtres d’Édom,

les puissants de Moab,

un tremblement les saisit,

ils fondent tous, les habitants de Canaan.

16. Tombent sur eux

épouvante et terreur,

dans la grandeur de ton bras

ils sont muets comme la pierre,

tant que passe ton peuple, Seigneur,

tant que passe ce peuple que tu as acquis.

17. Tu les emmèneras, les planteras

dans la montagne, ta possession,

lieu que tu as créé, Seigneur,

via ta demeure,

sanctuaire, mon Seigneur,

fondé de tes mains !

18. Le Seigneur règne via l’éternité, à jamais. »

19. Car est entré le cheval de Pharaon, son char et son armée, dans la mer, et il a fait retourner sur eux, le Seigneur, les eaux de la mer, et les fils d’Israël ont marché à pied sec au milieu de la mer.

20. Alors Marie, la prophétesse, sœur d’Aaron, prit en sa main un tambourin, et sortirent toutes les femmes à sa suite, dans les tambourins et les danses du pardon.

21. Et Marie leur entonna :

« Chantez via le Seigneur, il est monté, il est monté,

cheval et cavalier à la mer il a jetés ! »

*

Notre frère l’espace-temps

ngm-gobekli-tepe-artwork_480x360

*

Je songe à Göbekli Tepe, son nom me rappelle celui de mes derniers fils. Le plus ancien temple monumental connu, datant de 11000 ans avant notre ère, soit 7000 ans avant les pyramides. Des milliers de pèlerins s’y retrouvaient, c’est peut-être de là qu’est partie l’agriculture, pour pouvoir nourrir tout ce monde aux moments d’afflux. Une agriculture religieuse, comme on la pratiqua, à l’époque contemporaine, dans des monastères. On ne sait rien de la religion qui lui donna lieu. C’était encore la préhistoire, le début du néolithique. On sait si peu. Je songe à la découverte récente d’objets gravés de signes géométriques, datant semble-t-il de 500 000 ans, alors qu’Homo Sapiens n’existait pas encore.

Je songe à la découverte du plus ancien système planétaire de notre galaxie connu à ce jour. Comprenant cinq petites planètes orbitant tout près d’un petit soleil, dont elles font le tour en quelques jours. N’est-ce pas charmant comme un jeu d’enfants ? Je songe aussi à la découverte que notre système solaire comporte sans doute au moins deux planètes de plus. La maison a plus de pièces que nous ne l’imaginions. Et puis je songe que, toujours dans les nouvelles de ces derniers jours, on nous annonce avoir perçu en direct un signal radio venu d’une autre galaxie, vers la constellation du Verseau, dont on ne sait ce qui l’a émis.

*

Sauvage

Longs chapelets de rêves splendides, sauvages, hier et cette nuit. Dormant sous une tente tout au bout de la Fin des Terres avec O, à côté de la grande tente ronde des oiseaux, leur campement. Par l’ouverture de la nôtre, je les contemplais, par l’ouverture de la leur. Le matin venu, dans sa lumière vivante, déchirante, arrivée d’une grande manifestation, là, jusqu’au bord de l’eau, de l’océan. Je prenais mon appareil photo dans notre voiture et je la photographiais. Je photographiais notamment l’un des manifestants, qui portait un panneau aussi grand que lui, tout écrit ; puis il me demandait si j’accepterais d’écrire un livre retraçant son engagement politique. La route nous attendait, O et moi, mais il n’était pas impossible de tout faire, cela restait à voir. Hier mes rêves se terminaient sur des noms de personnes et de lieux, que j’inventais, qui me venaient, nus, étranges et beaux comme du début du monde.

*

Franchissement

Je prépare dans ma tête mon roman inouï, « Histoire de l’être », qui sera un peu, si Dieu le veut, L’Iliade et l’Odyssée du temps qui vient. Ce matin en me réveillant j’ai compris encore quelque chose sur ce fameux « être ». Appuyée sur de nombreux travaux accomplis par des chercheurs de différentes disciplines, notamment scientifiques, et bien sûr aussi sur mon expérience propre, je vais de découverte en découverte. Le tout est d’analyser et de synthétiser. C’est justement ce que j’adore faire. Le travail est immense, et donc la joie aussi. C’est un travail pour l’essentiel invisible, et il donne toute quiétude parce qu’il s’accomplit dans l’assurance que même s’il ne pouvait être achevé en ce monde, il le serait dans un autre, de la même façon ou d’une autre, et pour tous les mondes. Et ce que j’aurai achevé en ce monde, je le parachèverai quand je n’y serai plus, car j’ai franchi les portes du temps.