Renverser le nihilisme

J’œuvre à renverser l’état d’esprit du monde. Cela ne peut se faire en se pliant à l’état d’esprit du monde. Il est possible d’appliquer sur le monde telle ou telle œuvre, comme tel ou tel pansement. Cela est bon, mais ce que j’ai à faire, c’est régénérer l’ensemble du corps, et même plus en vérité : le ressusciter. Il faut pelleter dans la terre pour en exhumer le cadavérique, c’est quelque chose qui a à voir avec les tremblements de terre, les déluges et autres catastrophes et merveilles venues du ciel et de profundis. Terrasser dans la matière, dans l’obscur, l’indifférencié, creuser jusqu’à la source, qu’elle jaillisse, que l’être en ressuscite. Je suis armée de la parole, de la foi, de l’amour absolu. Mon œuvre agit et agira, je vous le garantis.

Pâques, la Compassion du Christ

En joignant le geste de l’eucharistie (rendre grâce à Dieu) à celui de la communion (nourrir les hommes de son être pour leur montrer que Dieu est uni à eux et qu’il les unit en Lui), Jésus lors de la Cène fait signe que sa Passion est en vérité une Compassion. Il ne souffre pas seul pour tous, il souffre avec tous ceux qui souffrent. Et c’est pourquoi il souffre plus que ne peut souffrir un homme, et c’est pourquoi il en meurt, et c’est pourquoi aussi il en ressuscite. Il ressuscite parce qu’il n’a pas souffert seul, il a souffert pour tous, les vivants et les morts. Sa mort n’est pas en lui seul, elle est aussi en tous les morts et en tous les vivants, qu’il ne peut pas abandonner à la mort. Quand il demande de manger, via le pain et le vin, son corps et son sang, en mémoire de lui, cela signifie : nous coressusciterons. En mangeant ce morceau de pain devenu son corps et en buvant ce vin devenu son sang, nous le prenons en nous corps et âme, parce que c’est notre propre corps, notre sang, notre chair, nos os, qui donnent corps à son âme. Et quand nous donnons corps à son âme, elle emporte notre corps dans son éternité. Et le temps des vivants et des morts devient une éternité prise en commun, en communion, une coéternité avec toute l’humanité, transportée en Dieu, l’Éternel.

Une preuve de cela est donnée dès le lendemain, au Golgotha. Jésus n’est pas le seul à être crucifié. Deux autres hommes souffrent aussi sur une croix. Sans doute, contrairement au Christ, chacun des deux souffre-t-il pour lui-même. Mais l’un d’eux va sortir de lui-même pour entrer en compassion avec Jésus, et aussitôt Jésus lui annonce que le jour même, il sera au paradis avec lui. La compassion transporte les mortels dans une autre dimension.

L’animal s’étire

« La plupart des gens ne réalisent pas le pouvoir que possède le génie de comprendre l’essence d’un sujet sans avoir besoin de l’étudier laborieusement. » Aleister Crowley.

C’est la révolution spirituelle qu’il faut faire. La révolution sociale suivra d’elle-même. Beaucoup la font, même si on les voit mal. Sphère par sphère, hors-champ, continuer.

Ce qui viendra n’est pas un nouveau projet commun, ni un nouveau poème commun, c’est un poète commun, Le poète, revenu.

Déjà les envoyés font cortège et le précèdent, désordonnés encore et les yeux embués.

L’animal s’étire, le sentez-vous ? Ce n’est pas en un seul, ce n’est pas en quelques-uns, c’est en chacun que le poète veut s’étirer.