Rentrée littéraire

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Je suis partie avec mon ordi en bandoulière, travailler à la bibliothèque. Moi aussi je prépare la rentrée littéraire : de nouveaux livres numériques à venir sur ce site, et puis quelque(s) cadeau(x), nous verrons. Puis Sydney m’a rejointe, et nous avons fait quelques photos pour renouveler celle de la page d’accueil, dans quelques jours. La vie devant nous, le bonheur partout. Nous allons tout réinventer. Que la joie soit sur vous !

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Le sublime

dans la maison de Dieu, photo Alina Reyes

 

« Nous sommes tous les quatre plantés devant la fenêtre du premier étage, et nous scrutons l’obscurité, suspendus dans le noir d’une foi aveugle – guettant la prochaine trouée dans les nuages qui nous permettra d’entrevoir le retour de la lune de l’autre côté.

Il me vient soudain à l’idée que ce dont nous venons d’être témoins ressemble à quelque chose que nous aurions pu voir dans un film, dans un spectacle de prestidigitation mis en scène par Hollywood – tout cela n’a été qu’une illusion – et pourtant l’événement laisse un sillage de réalité, une authenticité dépassant ce que nos sens nous disent que nous venons d’observer. Alors que je me tiens devant cette fenêtre avec ma famille, je comprends qu’il existe une distance fixe entre le sublime et la représentation du sublime, et nous restons là tous les quatre dans l’ombre, dans l’obscurité, chacun ayant parfaitement conscience de cet écart et s’installant confortablement dans cet espace : le dos tourné vers l’un, le visage tendu vers l’autre. »

Rick Bass, Le journal des cinq saisons

Demain est l’Aïd El-Fitr, la fête de fin du Ramadan.  J’ai lu ce matin le tout petit livre sur les 99 noms divins que j’ai trouvé l’autre jour à la librairie face à la mosquée. Voici la page d’un beau site consacrée à ces Noms, avec leur commentaire par Ghazali, indiquant la nature de la possible participation humaine à ces qualités divines.

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François au pays des cauchemars

 

Rien n’est « normal » dans cette photo. Je sais que Depardon a perçu quelque chose de profond, il ne peut en être autrement. Et qu’il le dit, plus ou moins malgré lui, tout en essayant de rentrer dans le cadre de la « normalité » de  campagne du nouveau Président. Justement, la campagne est là, au sens premier du mot cette fois. Oui, ça commence, on va au fond. Au fond des choses. Dans le cadre carré où tout le physique de l’image est transposé dans une métaphysique occulte, non-dite, inavouée. Le carré, dans l’ordre symbolique, c’est le domaine de la terre, par opposition et complémentarité au rond du ciel, de l’esprit. Mais ici le ciel n’est pas rond, il est brisé par les lignes floues de l’Élysée. Brisé et décoloré, négligé – toute la netteté, l’attention de l’objectif étant portée sur l’homme. L’Élysée, dans la mythologie, est le séjour des bienheureux aux enfers. Bienheureux, mais morts.

Le palais présidentiel, avec ses drapeaux français et européen, est aussi flou que dans un rêve, aussi lointain que dans un cauchemar. Toute la photo respire l’irréalité, le clivage, la séparation. L’homme, central, s’y tient comme un objet rapporté. Pour autant ni la nature (l’herbe, l’arbre) ni la culture et l’histoire (les bâtiments, les drapeaux) n’y sont solidement fondés. Flous, lointains, ils semblent plutôt en voie de disparition. Seule l’ombre paraît animée, en voie de progression. Désignant sous ce vaste désert d’herbe la terre, sombre séjour des morts.

Cette photo est anxyogène. L’homme y est central mais déporté sur la gauche, le côté « sinistre » comme on dit en latin. Son attitude est figée, mais en déséquilibre. S’il avance c’est en crabe. Ses mains ne sont pas à la même hauteur, et son costume l’engonce. Il sourit mais ses yeux tombent, comme ses bras. Ses mains paraissent presque énormes, presque des mains d’assassin, et en même temps comme mortes, tranchées. Des bouts de chair empreintes d’une morbidité diffuse.

 

 

Ce pourrait être l’homme de la Renaissance, l’homme de Vitruve, inscrit au centre du monde dans son carré et dans son cercle, mais non. Celui-ci est déporté du centre, ses jambes sont coupées, ses bras ne s’étendent ni ne se lèvent ni ne soutiennent le cosmos – ses pieds qu’on ne voit pas, ne les a-t-il pas plutôt dans la tombe, cette terre à la fois cachée et omniprésente ? Ce n’est pas non plus l’homme du Moyen Âge, tel que le figura Hildegarde de Bingen, régnant à l’image de Dieu au centre des réalités spirituelles.

En fait l’image donne l’idée d’un montage. C’est cela, qu’a perçu Depardon. Comme si l’on avait découpé l’homme pour le plaquer sur fond d’Élysée. Cette photo crie au mensonge, voilà la vérité. La vérité, c’est que l’humanisme contemporain est un mensonge.

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